Dans les débats sur le terrorisme islamiste, une notion théologique mérite une attention particulière : la taqîya. Ce concept ancien, souvent mal compris, fait aujourd’hui l’objet de détournements inquiétants par certains groupes extrémistes.

Une tradition de survie dans l’adversité

À l’origine, la taqîya est un principe islamique autorisant un croyant à dissimuler sa foi en cas de danger ou de persécution grave.
Elle repose sur une intention claire : préserver la vie, la dignité et la communauté religieuse face à des menaces existentielles.

Historiquement, elle a été pratiquée par :

  • Les chiites dans des contextes de domination sunnite
  • Des minorités musulmanes sous des régimes oppressifs
  • Des situations de guerre ou de répression extrême

Dans ce cadre, la taqîya ne visait ni la ruse ni l’agression, mais la survie dans un environnement hostile.

Une réinterprétation stratégique par les groupes jihadistes

Aujourd’hui, certains réseaux terroristes, notamment affiliés à l’État islamique ou à Al-Qaïda, se sont approprié ce concept à des fins opérationnelles.
Ils en font un outil de dissimulation tactique, permettant à leurs membres de se fondre dans la société, parfois pendant des années, avant de passer à l’action.

Concrètement, ces individus peuvent :

  • Adopter une apparence occidentalisée
  • Consommer de l’alcool ou des aliments jugés illicites
  • Simuler une intégration culturelle et sociale
  • Fréquenter des lieux publics et festifs sans éveiller de soupçons

Cette stratégie vise à déjouer les services de renseignement et à préparer des actions violentes dans l’ombre, tout en brouillant les repères habituels de la radicalisation visible.

Un détournement idéologique profond

Il est fondamental de rappeler que cette instrumentalisation dénature radicalement le sens originel de la taqîya.
Ce qui était un mécanisme de protection devient une arme de dissimulation au service de la violence.

Cette dérive révèle la capacité de certains groupes extrémistes à :

  • Réinterpréter les textes religieux
  • Justifier des comportements contraires à l’éthique musulmane
  • Exploiter la confusion autour des concepts spirituels pour avancer masqués

En brouillant les frontières entre foi, ruse et violence, ils entretiennent une zone grise idéologique, dangereuse pour la compréhension publique de l’islam.