Être en mesure de détecter des risques est un exercice qui conduit obligatoirement à pénétrer dans le champ des possibles où le mot « impossible » a été banni à jamais.

En matière d’analyse de risques, il y a les risques qui sautent aux yeux et puis il y a les autres, dissimulés dans un épais brouillard, attendant le moment opportun pour se matérialiser.

Les risques peuvent être comparés à des natures vivantes, aussi imprévisibles que maléfiques. Les risques font partie de notre quotidien, sans que nous en soyons forcément conscients. Et pourtant, le mot « risque » fait partie intégrante de notre vocabulaire : « nous risquons de bien nous amuser », « cela risque d’être fatigant », « que risquons-nous à tenter notre chance ? », « je risque le tout pour le tout », etc. Dans toutes ces phrases, le risque est vu comme une probabilité que cela puisse bien se dérouler. Nous avons toutefois conscience que cela pourrait ne pas être le cas.

Le véritable problème avec l’analyse des risques est que l’on associe ces risques à une probabilité d’occurrence. Vous savez quoi ? Définir une probabilité d’occurrence est un exercice extrêmement risqué.

En effet, une probabilité d’occurrence peut passer de faible à certaine en une fraction de seconde, et c’est en cela que réside tout le problème. En l’espèce, gardons à l’esprit que les composantes des risques jouent à une sorte de cache-cache.

Dans les faits, nous ajustons la probabilité d’occurrence en fonction des composantes du risque que nous identifions. Si nous observons des manifestations régulières avec des violences accrues, il sera alors possible de dire que le risque d’émeutes est probable, voire certain. Cependant, si nous assistons à des manifestations qui se déroulent dans de bonnes conditions sécuritaires, la probabilité du risque d’émeutes sera à un niveau très faible.

Pour illustrer cette approche, prenons l’exemple des toutes premières manifestations des gilets jaunes. Les premiers rassemblements sur des ronds-points étaient, si l’on peut dire, bon enfant. Puis vint le jour de la première grande manifestation parisienne sur les Champs-Élysées alors qu’elle était attendue sur le Champ de Mars. Et là, patatras : barricades sur les Champs-Élysées, incendies, affrontements avec les forces de l’ordre, pillages de magasins, etc.

Dans ce cas, les composantes du risque se sont assemblées, à savoir la foule, la colère, des moyens (baraques de chantier, poubelles à enflammer, etc.), et le risque d’émeute vit le jour, prenant de court la préfecture de police de Paris.

Gérer des risques, c’est aussi se préparer à faire face à l’impensable. Aucun spécialiste de la lutte antiterroriste n’a été entendu lorsqu’ils mentionnaient le risque d’un attentat sur le sol américain le 11 septembre 2001, et les exemples en la matière sont multiples.

Une analyse de risques n’est en aucun cas une affaire de sentiments, mais uniquement le décryptage d’une situation à peine perceptible.