Cette nuit, j’ai rêvé que je vivais dans un pays nommé Utopia. La pauvreté, la méchanceté, l’égocentrisme, la démagogie, la barbarie y étaient bannis, et plus généralement toutes les formes de violence physique ou psychologique. Le capitalisme outrancier que nous avions connu au 21e siècle était une histoire ancienne. Notre planète Terre avait été sauvée et pouvait enfin respirer grâce aux mesures drastiques imposées au reste du monde par les dirigeants d’Utopia.
Les discours enflammés des leaders d’Utopia ne pouvaient être qu’un gage de sincérité et me faisaient vibrer. Je regardais ce monde qui m’ouvrait ses bras avec mes yeux de vingt ans et l’idéalisme qui l’accompagne . Les dirigeants d’Utopia avaient eu le courage de « retourner la table » des jeux politiques. Comme ils le disaient avec fierté, ils avaient réussi à chasser tous ces « politicards véreux » et sans âme. Le peuple d’Utopia avait pris son destin en main grâce à ces femmes et hommes qui ne vivaient, selon eux, que pour défendre le bien commun. La notion de riche et de pauvre avait été gommée et le peuple était réuni désormais autour d’une même table. Des centres spécialisés d’éducation avaient été créés pour accompagner celles et ceux qui avaient des difficultés à trouver leur place dans ce nouveau modèle de société.
Je parcourais ce vaste pays à la vitesse de la lumière quand une porte sur laquelle était inscrit « À n’ouvrir sous aucun prétexte » attira mon attention. N’écoutant que mon courage – et je dois vous l’avouer mon soupçon de folie – je ne pus m’empêcher bien entendu de l’ouvrir. Le spectacle qui s’offrit à moi me glaça le sang. Je vis un monde sombre où la colère et la haine avaient élu domicile.
Sans pour autant être capacité de les voir, je ressentais la présence des véritables pères fondateurs d’Utopia tels que Maximilien de Robespierre, Joseph Staline, Adolph Hitler, Pol Pot, Benito Mussolini, Mao Zedong et de bien d’autres personnages tout aussi diaboliques , dont certains étaient encore sur terre attendant leur heure pour rejoindre leurs maîtres penseurs. Effrayé par un tel spectacle, je voulus refermer la porte, mais cela m’était totalement impossible. Tous ces êtres désincarnés en profitèrent pour retourner dans ce pays qu’ils avaient créé et se partageaient sans vergogne.
D’un seul coup, la lumière fit place à la nuit et la joie de vivre tant espérée au chaos. En se montrant au grand jour, les maîtres d’Utopia avaient bouleversé toutes les illusions qui entouraient leurs doctrines. Puis soudainement, je me suis réveillé en sueur, effrayé par ce terrible rêve.