À une époque pas si lointaine, il fallait lire les romans de John Le Carré pour entrevoir les arcanes du monde de l’espionnage. Plus récemment, des œuvres comme Spy Game ou la série Le Bureau des Légendes ont alimenté l’imaginaire collectif, projetant l’image d’espions au regard perçant et à la vie trépidante.
Mais la réalité, plus sobre et plus complexe, est aujourd’hui racontée par ceux qui l’ont vécue de l’intérieur.
Olivier Mas, alias Beryl614, est l’un de ces anciens agents passés de l’ombre à la lumière. Saint-Cyrien, diplômé de l’École de guerre, il débute au sein du prestigieux 1er RPIMa avant de rejoindre les rangs de la DGSE.
« Au fil des années, ma carrière de militaire m’éloignait du terrain. Intégrer la DGSE, c’était continuer à vivre intensément, humainement et intellectuellement », confie-t-il.
Au sein de la direction des opérations puis du renseignement, il exerce des missions sous légende et dirige des postes à l’étranger. Le service des clandestins, club très fermé, façonne son parcours : « Sous légende, vous êtes parfois seul, à des milliers de kilomètres de vos chefs. Il faut tout gérer, y compris l’imprévisible. »
Contrairement à ce que son passé aurait pu laisser présager, Olivier Mas n’a pas choisi de poursuivre dans la sécurité privée ou le conseil en sûreté pour entreprises. « Après avoir servi la France, je ne voulais pas transférer ce savoir-faire au secteur privé, même si cela peut sembler logique. J’avais envie d’exprimer ma créativité autrement. »
Résultat : une chaîne YouTube baptisée Talks with a Spy, où il décrypte avec pédagogie les techniques de renseignement. Auteur également de deux livres, J’étais un autre et vous ne le saviez pas et Profession espion, il partage une expertise rare tout en respectant scrupuleusement ses obligations de secret.
Aujourd’hui, sa chaîne compte plus de 144 000 abonnés, un chiffre qui témoigne de l’intérêt grandissant du public pour l’univers feutré du renseignement.
Créer une chaîne sans en référer initialement à la DGSE aurait pu sembler risqué. Mais Olivier Mas tient à préciser : « Je suis toujours tenu au secret. Je n’ai jamais l’intention de divulguer des informations sensibles. Les sources ouvertes suffisent à alimenter mes contenus tout en apportant la légitimité liée à mon expérience. »
Si l’ancien clandestin n’est plus officiellement en service, il contribue, peut-être malgré lui, à offrir une vitrine de prestige à la DGSE, institution toujours en quête de jeunes recrues.
Olivier Mas vit encore sous fausse identité, perpétuant ainsi cette culture du secret qui fait partie intégrante de son ADN. À travers ses vidéos et ses écrits, il continue de transmettre une vision exigeante, humaine et réaliste du métier d’espion, loin des caricatures hollywoodiennes.