En 1972, un scientifique américain, John B. Calhoun, a placé des souris dans un monde parfait. Un espace clos, protégé, sans menace. De la nourriture à volonté. Des abris sûrs. Un confort total. Il a appelé ce projet : Univers 25.

Ce qu’il a observé ensuite n’est pas sans lien avec ce que nous vivons aujourd’hui. Et c’est là que tout bascule.

Le confort peut-il nous détruire ?

Au début, tout va bien. Les souris mangent, dorment, se reproduisent. Elles vivent en paix. L’expérience semble réussie. Mais très vite, des anomalies apparaissent.

Les comportements changent. Les mères abandonnent leurs petits. Certains mâles deviennent violents. D’autres s’isolent, totalement passifs. Les groupes se délitent. Plus personne ne protège personne. Le lien social s’effondre. Et en quelques mois, la colonie meurt.

Pas à cause d’un manque. Mais à cause de l’excès.

Ce que dit cette expérience de nous

Ce qui s’est joué là, entre les murs d’un laboratoire, résonne étrangement dans notre monde.

Nous avons construit une société qui ressemble à cet univers. Elle nous offre tout. Trop parfois. Du confort, de la sécurité, du divertissement. Mais à quel prix ? Le lien humain se relâche. Le sens se perd. Et malgré l’abondance, l’angoisse s’installe.

Ce n’est plus une peur de manquer. C’est une peur de soi, du vide, de l’inutilité. Une forme de désorientation douce. Une crise de l’être dans un monde trop plein.

L’illusion du progrès linéaire

Nous pensons que plus nous avançons, mieux nous vivrons. Mais si avancer signifiait aussi nous désancrer ? Si le progrès, sans régulation, devenait une pente douce vers l’oubli de ce qui nous structure ?

Cette idée n’est pas confortable. Elle dérange. Pourtant, elle mérite d’être posée. Le problème n’est pas la technologie, ni le confort. C’est la perte du lien. La perte de la nécessité. L’effacement de l’effort.

Sans friction, rien n’accroche. Sans tension, rien ne tient.

Ecrire n’est pas alerter, c’est comprendre

Je ne cherche pas à provoquer. Je ne crois pas qu’un texte puisse inverser une trajectoire. Ce n’est pas une alerte, ni un manifeste. C’est une tentative de comprendre. D’accepter que parfois, trop de facilité tue le vivant. En nous aussi.

Il n’y aura pas de morale à cette histoire. Pas de solution toute faite. Seulement cette intuition : il nous faut retrouver un peu de rugosité. De confrontation. D’humanité.

Avant qu’il ne soit trop tard.