Quels leçons doit-on retenir de la gestion d’une crise ? Les experts retiennent généralement 7 enseignements essentiels :
La toute première question à se poser est de savoir si l’entreprise ou l’organisation était suffisamment préparée pour faire face à un tel événement.
Se préparer à la crise, c’est en premier lieu un travail de prise de conscience qui nécessite d’identifier les crises susceptibles d’impacter l’activité, les personnels ou l’image de marque de l’entreprise ou de l’organisme et d’en évaluer leur probabilité d’occurrence et leur gravité.
Se préparer à faire face à une crise est un exercice extrêmement difficile, car il s’agit en l’espèce de faire face à l’incertitude. Dans ce contexte, il est essentiel que la mécanique en matière de gestion de crise soit parfaitement huilée et que tous les acteurs connaissent parfaitement leur place et leurs missions. Un manque de préparation en matière de gestion de crise se ressent immédiatement et a pour conséquence de déstabiliser un peu plus les personnes, victimes directes ou indirectes de la crise.
Contrairement à ceux qui subissent la crise, être préparé ne veut en aucun cas dire que tout est sous contrôle, sans quoi la crise n’aurait pas eu lieu, car elle aurait été indolore pour le plus grand nombre.
Dans ce travail d’anticipation de la crise, une autre question qui se pose est de savoir où placer le curseur quant aux mesures préventives et aux moyens de protection qui seront déployés.
Dans le cas de la crise du coronavirus covid-19, la France aurait-elle dû stocker 3 ou 4 milliards de masques, des centaines de millions de litres de gel hydroalcoolique ainsi que des milliers de respirateurs ? La France aurait-elle dû avoir une organisation semblable à celle de Taiwan ou Hong-kong ? Seuls les prophètes de la 25e heure peuvent répondre par l’affirmative à ces interrogations, car si une telle organisation avait été déployée il y a deux ans en France, il ne fait aucun doute qu’un tel déploiement aurait entraîné un scandale politique du fait des montants engagés par le gouvernement.
En effet, si en période de « guerre » les citoyens ne peuvent pas comprendre et admettre le manque de moyens, il ne fait aucun doute qu’en temps de « paix » ces mêmes citoyens n’auraient pas plus accepté une surabondance de moyens préventifs afin de faire face à un risque hypothétique. Et ce n’est pas l’adage « Si vis pacem, para bellum » (si tu veux la paix, prépare la guerre) qui y changera quoi que ce soit.
La question des moyens est bien évidemment primordiale en temps de « guerre ». Mais faute de moyens à la hauteur de la crise, il s’agit pour les personnes ayant en charge la gestion de crise de montrer au plus grand nombre un visage empli d’assurance, d’organisation, mais aussi de transparence.
En pleine tempête, le message qui doit être adressé par le commandant à l’équipage et aux passagers est : « Oui, nous affrontons une tempête hors norme. Oui, il y aura de la « casse ». Mais, non, le bateau ne coulera pas, car nous sommes préparés et entraînés à faire face à ce type de situation ».
L’honnêteté et le courage sont deux « armes » indispensables en matière de gestion de crise. Si l’honnêteté doit être « palpable », le courage est quant à lui primordial, car il s’agira de prendre des décisions qui seront jugées, commentées et critiquées.
La pire des erreurs en matière de gestion de crise est l’immobilisme. Cette posture peut avoir plusieurs origines. La première est la peur de prendre la mauvaise décision et la seconde la recherche d’un consensus. Si se tromper fait partie de l’équation de toute prise de décision, essayer de trouver un consensus concernant les mesures à prendre n’est pas un exercice périlleux, mais tout simplement une erreur stratégique qui n’a pour résultat en période de crise que de figer la situation.
Si le doute peut être considéré en situation normale comme l’antichambre de la vérité, en situation de crise le doute devient l’antichambre de tous les maux. Une crise ne fait pas de pause et pourrait même être comparée à une sorte de mouvement perpétuel qui se renforce à chaque mouvement. En l’espèce, le tout premier objectif de ceux qui ont en charge la gestion de crise doit être de ralentir sa progression, à défaut de pouvoir la stopper.
Gérer une crise, c’est apprendre à agir avec rapidité, sans pour autant que la certitude fasse partie de l’équation. Quels que soient les plans qui auront été imaginés, gérer une crise c’est aussi accepter de mettre en place en œuvre des stratégies qui ne pourront être qu’à géométrie variable, cette approche pouvant être surprenante pour celles et ceux qui vivent la crise.
Dans l’imaginaire collectif, une crise devrait être gérée avec une linéarité sans faille, avec des plans qui fonctionnent à cent pour cent et avec des conséquences qui soient les plus indolores possible. Hélas, ce type de déroulement ne peut être mis en œuvre que dans les nombreux livres et manuels qui traitent des crises.
Le propre d’une crise est de surprendre, d’être vivace et de défier en permanence toutes les probabilités, sans quoi une crise ne serait pas une crise, mais juste une situation non conforme qui s’est matérialisée et qui a été immédiatement placée sous contrôle.
Faire face à une crise, c’est faire face à une incertitude et une insécurité permanente où l’anticipation et l’agilité seront les seules alliées sur lesquelles se reposer.
Faire face à une crise, c’est aussi agir de manière collective, car l’individualisme ne peut entraîner que l’échec. Seul un groupe solidaire et déterminé peut, malgré les coups qui auront été portés, continuer d’avancer afin dans un premier temps de protéger ce qui peut l’être et dans un second temps de reconstruire ce qui a été détruit.
Cet effet de groupe ne doit en aucun cas être perçu comme les « bons petits soldats » obéissants suivant leur chef. Ce n’est pas un chef qui terrasse la crise, mais le groupe. Les seuls lauriers qui seront adressés au chef sont ceux des critiques lorsque son plan n’aura pas eu les conséquences escomptées. Les victoires seront collectives et les défaites individuelles à l’adresse de celui qui aura conduit la gestion de crise.
La gestion d’une crise n’est pas un exercice démocratique, tant les paramètres sont multiples afin d’essayer de prendre les bonnes orientations. Le décideur écoute, interroge, puis tranche en fonction des informations qui lui sont communiquées et de l’analyse qu’il en fait.
Une crise est toujours révélatrice de mauvaises, mais aussi de très bonnes surprises. Mettons de côté les mauvaises surprises et attardons-nous sur les bonnes. La toute première est l’engagement de celles et ceux qui sont en « première ligne » ou qui subissent la crise.
Dans le cas de la crise du Coronavirus Covid-19, cet engagement admirable des médecins, des infirmières, des agents d’entretien ou de sécurité, de tous ceux qui nous permettent de nous nourrir, etc. dépasse de très loin le simple fait d’accomplir sa tâche professionnelle. Toutes ces personnes savent pertinemment qu’elles s’exposent quotidiennement à un risque ultime : celui d’être infecté, de tomber malade et de potentiellement mourir. Toutes ces « guerrières » et tous ces « guerriers » ne sont pas inconscients, car ils accomplissent chacun dans leurs fonctions une mission au service de la collectivité.
En agissant ainsi, ces personnes ne recherchent pas de prime ou de reconnaissance. Leurs objectifs sont uniquement de faire face à l’adversité et de servir. Tels des commandos, ces femmes et ces hommes franchissent les lignes ennemies pour le déstabiliser et l’affaiblir.
Il est toujours surprenant de constater que dans de telles situations des personnes qui pouvaient être jugées comme discrètes ou effacées se révèlent au grand jour et deviennent de véritables leaders
Que penser, sinon le plus grand bien, de ces jeunes de quartiers sensibles qui organisent un soutien logistique pour les personnes les plus fragiles en pleine crise du Coronavirus ?
La crise a la vertu d’extraire le meilleur de l’être humain et, malheureusement, parfois le pire. Lorsqu’une crise surgit, les masques ne peuvent que tomber, sans quoi ils se voient comme le nez au milieu du visage.
Gérer une crise, c’est faire l’apprentissage des certitudes qui s’effondrent, des remises en question permanentes, des plans qui doivent coller en permanence au terrain sans quoi ils volent en éclat. C’est aussi un management en pleine conscience, car les femmes et les hommes sont le cœur du « système ».
Une crise chamboule un ordre établi, des fondamentaux qui étaient sur le papier quasiment indestructibles. Une crise peut venir briser le travail d’une vie, des rêves, des familles.
Mais, quels qu’en soient les impacts, une crise ne doit en aucun cas altérer notre volonté de continuer à avancer, notre créativité ou notre foi dans le fait que demain sera dans tous les cas un autre jour. La crise n’échappe pas à l’impermanence.
Une crise est toujours pleine d’enseignements qui ne doivent pas nous affaiblir sur le long terme, mais nous faire grandir.