En juillet 1977, le rapport Peyrefitte alertait : « Longtemps tenue en marge, la violence s’est installée au cœur de la Cité. Pas encore en maîtresse – mais ce temps peut venir. Si rien n’est fait pour répondre à l’interpellation qu’elle nous adresse, ce temps viendra sans doute… »
Depuis cette mise en garde, les décennies se sont succédé, ponctuées de rapports, de mesures et de stratégies censées ramener la paix dans nos cités. Pourtant, l’évidence s’impose : l’insécurité gangrène encore aujourd’hui des pans entiers de notre territoire.
Le rapport Bonnemaison de 1982, intitulé Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité, devait incarner un tournant. Il n’en fut rien. Les bonnes intentions se sont heurtées aux réalités d’un terrain où les fractures sociales, l’abandon des services publics et la montée des trafics ont transformé certains quartiers en zones de non-droit.
Malgré les empilements législatifs et les dispositifs successifs, la situation s’est détériorée. La violence n’est plus à nos portes : elle habite la cité.
Aujourd’hui, il ne suffit plus de sécuriser les quartiers sensibles. Il faut les reconquérir. Permettre à leurs habitants de se réapproprier leur quotidien, en recréant des espaces de vie, en soutenant l’activité économique locale, en implantant durablement les services publics et les forces de l’ordre. Ce n’est pas une utopie : des exemples, comme ceux que nous avons mis en œuvre avec Alain Bauer dans les années 1990, prouvent que cela est possible.
Il s’agit d’une action globale : sécuritaire, sociale, éducative et profondément humaine. Il ne peut y avoir de paix durable sans rendre à ces territoires leur dignité et leur ancrage républicain.
Le temps des rustines sécuritaires est révolu. Multiplier les lois sans en garantir l’application, saupoudrer les financements sans stratégie de long terme, adopter des postures sans agir véritablement : tout cela n’est plus tolérable.
Face à l’ampleur des défis, il est urgent de bâtir une véritable politique de reconquête, non seulement pour restaurer l’ordre, mais pour permettre à ceux qui vivent dans ces quartiers d’espérer à nouveau.
Enfin, il est indispensable de rappeler que ceux qui attisent les braises de la division sous couvert de compassion finiront toujours par être démasqués. Les véritables bâtisseurs de paix sont ceux qui œuvrent loin des caméras, dans l’ombre, pour redonner à la République tout son sens.