On pose souvent la question à voix basse. Mais, non, il n’est pas nécessaire d’avoir été au GIGN, au RAID, dans l’armée ou dans la police pour diriger la sûreté d’une grande entreprise.
Cette réponse n’enlève rien à la valeur de l’expérience des personnes suscitées.
L’entreprise, un écosystème d’influence
Une organisation ne fonctionne pas comme une base arrière ou un théâtre d’opérations.
Elle vit de rapports de force feutrés, de budgets négociés et d’arbitrages progressifs.
La mission centrale du directeur de la sûreté consiste à convaincre, à faire comprendre qu’un risque existe avant qu’il ne frappe et qu’une prévention bien pensée coûte moins qu’une crise mal gérée.
La persuasion remplace l’ordre et la pédagogie s’impose au quotidien.
L’expérience opérationnelle, atout, mais pas sésame
Il ne fait aucun doute que venir des forces armées ou de la police apporte du sang-froid et une lecture claire de la menace. Et, ces réflexes aident en situation de crise et ils pèsent lourd dans la balance.
Pourtant, cela ne suffit pas.
En entreprise, il faut traduire la menace en langage économique et articuler gouvernance, conformité et continuité d’activité. De plus, la légitimité du directeur de la sûreté se gagne jour après jour sans uniforme. Elle se construit par la qualité des analyses et par un grand sens du timing.
Un métier à part entière, aux frontières multiples
La sûreté d’aujourd’hui assemble la protection des personnes et des sites, la continuité d’activité et notamment la sûreté des déplacements. Elle intègre aussi
la maîtrise des risques liés aux chaînes logistiques, le droit, la conformité et la réputation.
Cet ensemble reste cohérent et il bouge sans cesse.
Les compétences qui comptent vraiment
Sur le terrain, la différence se fait souvent ailleurs que sur la technique pure.
Les enquêtes récentes d’ISACA placent la pensée critique, la communication et la résolution de problèmes au premier rang des attentes déclarées par les organisations.
Autrement dit, la capacité à influencer de manière utile et à faire travailler ensemble des mondes qui s’ignorent encore trop et cette alchimie pèse plus qu’un catalogue d’outils.
Reconversions, ce que l’on observe
En France, la fonction s’est structurée rapidement et elle cherche sa place auprès des directions historiques. Le CDSE documente depuis des années l’émergence d’une filière et l’évolution des profils.
Les travaux académiques confirment la quête de légitimité et l’importance de l’influence interne.
La sûreté s’impose par la transversalité et par la compréhension des contingences propres à chaque entreprise. Mais c’est l’art de construire des alliances durables qui change ensuite l’équation.
En clair
On peut diriger la sûreté sans avoir porté l’uniforme. Ce qui prime, c’est l’aptitude à articuler le risque et la stratégie et la capacité à convaincre avant l’incident.
La réussite passe aussi par la création de coalitions utiles et par une posture stable dans la durée.
Les formations dédiées, comme les masters, les MBA ouvrent de nombreuses portes.
Mais, c’est la détermination, la curiosité et l’ouverture d’esprit font le reste.
La chance s’invite parfois, mais ne sourit surtout qu’aux esprits préparés.