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Féminicides : un fléau mondial que rien ne freine

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Dans la nuit du 8 au 9 août, à Saint-Jouan-des-Guérets (Ille-et-Vilaine), une mère de 36 ans a été poignardée devant ses enfants par un ex-compagnon déjà connu pour violences conjugales. L’homme, qui a pris la fuite, a été rapidement localisé à Taden (Côtes-d’Armor) et abattu après avoir menacé les gendarmes avec un couteau. Deux enquêtes sont actuellement ouvertes, l’une pour le meurtre de la jeune mère de famille et l’autre sur la légitimité du tir du gendarme. Ce drame, insoutenable, illustre une réalité bien plus large, qui est que, malgré les dispositifs de prévention, la spirale meurtrière se poursuit.

Un féminicide qui cristallise les failles du système


Ce meurtre n’est pas un simple fait divers. Il met en lumière des mécanismes récurrents qui s’articulent autour de violences antérieures signalées, de dispositifs de protection disponibles, mais non déclenchés, et d’une escalade fatale. La question, brutale, reste entière, à savoir : cette jeune femme aurait-elle pu être sauvée ?

En Europe, des progrès trop lents


D’après Eurostat, environ 749 femmes ont été tuées en 2023 dans l’Union européenne par une personne qu’elles connaissaient ; dans plus de la moitié des cas, il s’agissait d’un partenaire intime ou d’un membre de la famille.
Selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), la proportion de féminicides dits « intimes » a diminué d’environ 20 % en Europe entre 2010 et 2023, mais 64 % des femmes tuées le sont encore par un conjoint ou ex-conjoint ; ce chiffre est le taux le plus élevé au monde.


En fonction des définitions adoptées par les États membres, le bilan global reste flou. Le total des féminicides sur la décennie varie entre 4 221 et 14 143 victimes. Cette marge, relevée par le réseau European Data Journalism, illustre la difficulté à mesurer précisément l’ampleur du phénomène… et donc à y répondre efficacement.

États-Unis : armes à feu et invisibilité juridique


Aux États-Unis, la situation est encore plus préoccupante. Selon l’ONG Everytown for Gun Safety, le pays concentre 70 % des féminicides recensés dans les pays riches. Chaque année, environ 2 000 femmes y sont tuées par des hommes, et souvent par arme à feu. Plus de 70 femmes meurent ainsi chaque mois sous les balles de leur partenaire.


L’ONU rappelle qu’une femme ou jeune fille est tuée toutes les dix minutes dans le monde par un membre de sa famille ou un partenaire. Aux États-Unis, 92 % des meurtres par arme à feu visant des femmes dans les pays riches se produisent sur leur sol. Et malgré ces chiffres, le terme de « féminicide » n’existe pas en droit américain, ce qui rend le phénomène invisible dans les statistiques officielles et complique toute action de prévention coordonnée.

Au-delà du cas de Rennes : un phénomène global


Le drame survenu en Bretagne résonne bien au-delà de la France. Partout, les chiffres sont incomplets, les mesures de protection mal appliquées, et la violence de genre trop souvent banalisée.


À chaque féminicide, les mêmes questions s’imposent : pourquoi les signaux d’alerte n’ont-ils pas été pris au sérieux ? Et surtout, combien faudra-t-il encore de drames avant que les dispositifs existants soient pleinement utilisés et déclenchés à temps ?

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